Lydia Martin, Jane Eyre – Franco Zeffirelli, Les Editions du Céfal, ISBN 978-2-87130-277-3
» A Florence, quand j’étais enfant, des dames anglaises dispensaient des cours particuliers. L’une d’elles, Miss Mary O’Neal, m’a fait découvrir les merveilles de la littérature anglaise. Je n’avais que dix ans quand j’ai lu pour la première fois Shakespeare et Charlotte Brontë. Jane Eyre était le livre favori de ma charmante préceptrice, et je continue à considérer ce roman comme l’un des plus beaux jamais écrits. Ce roman si moderne et si profond constitue à mon avis un événement marquant dans l’histoire des femmes du monde entier. Jane, sans être une véritable féministe, estime qu’elle n’est pas inférieure aux hommes. » (Franco Zeffirelli, » Interview with the director « , p. 5) Quelques lignes de l’entretien de Zeffirelli suffisent pour entendre l’admiration qu’il voue depuis toujours à Charlotte Brontë et l’intérêt qu’il porte à la condition des femmes. Il n’est donc pas étonnant qu’il octroie une telle place à Jane et à ses revendications féministes, démarche qui inscrit son adaptation dans la catégorie du woman’s film. Parallèlement, il offre au public un costume drama aux images élégantes derrière lesquelles s’effacent l’aspect révolutionnaire du roman à l’époque de sa publication (1847) le temps s’en était déjà chargé auprès des lecteurs et le discours religieux peu susceptible de séduire un public contemporain. Etroitement lié à la vague de heritage.films des années 1990 souvent produits par des réalisateurs étrangers conscients des clichés de l’Englishness, Jane Eyre met en valeur les beautés du patrimoine, les costumes, les paysages, les demeures qui participent au surgissement du gothique rattaché à l’univers patriarcal. Après avoir dressé un rapide état des lieux des diverses adaptations de Jane Eyre, en s’attachant à six d’entre elles, Lydia Martin explore celle de Zeffirelli : promotion du film, apports des procédés cinématographiques, scènes inventées supprimées modifiées, étude de la musique, influence de la peinture romantique. Elle étudie également la part allouée aux domaines qui font la richesse du roman : l’autobiographie fictive, le Bildungsroman, le romantisme, le réalisme, le gothique, le conte de fées, auxquels se joignent des angles d’approche correspondant à l’époque du tournage, comme le féminisme ou le post colonialisme.